Pleins feux sur la peinture à Montréal /
Painting in Montréal’s image

James Gardner On DP 2020 Oil, acrylic, and image transfers with burlap on canvas, approx 200cm x 200cm
Courtesy Maison de la culture NDG

 

Que se passe-t-il en peinture à Montréal? Il y a plusieurs raisons de croire que Montréal est une ville prédominante de la peinture au Canada. Il y a plus de soixante-dix ans, lors du Refus Global, un groupe de seize artistes et leurs professeurs osent confronter l’institution et déclarent leur allégeance à une forme d’art et de culture radicalement progressive. Parmi cette génération d’automatistes qui a formé l’avant-garde de l’art moderne canadien, plusieurs peintres ont obtenu une reconnaissance internationale. Dans le récent livre de Barry Schwabsky, The Observer Effect: On Contemporary Painting, l’auteur observe que le seul fait qu’un artiste se doit d’avoir une carrière démontre à quel point le milieu est conventionnel. Les automatistes, tout comme les expressionnistes abstraits, ne s’attendaient pas à avoir une carrière réussie; ils étaient néanmoins vraiment à cheval sur leurs principes artistiques, comme les artistes l’ont toujours été. Mais alors que dans notre système, devenir un artiste professionnel est devenu une norme, que les artistes sont aux prises avec le marché de l’art et avec les aspects académiques et gouvernementaux, les principes artistiques demeurent primordiaux. 

 

Où en sommes-nous maintenant? En 2020, comment la peinture répond-elle aux difficultés et aux défis du monde actuel? Quel est notre refus global? Comment les artistes, en particulier les peintres, confrontent-ils les dures réalités de notre monde et de notre système tout en faisant partie de ces institutions – tout en étant des acteurs du mouvement? Ce qui devient évident partout autour du monde est que « l’institution » artistique déçoit. Les règles du marché de l’art ne sont ni toujours stables ni puissantes, de bons artistes sont oubliés et la discrimination a toujours lieu; ces aboutissements sont peu inspirants et tardent à ce que l’art puisse rejoindre un nouveau public. Ironiquement, alors que le marché de l’art contemporain adhère à une perspective populiste, il n’est accessible exclusivement qu’aux gens très riches, et est inabordable pour le public général qui est ciblé. Plusieurs artistes, depuis les confins de leur atelier, cherchent à prendre position et à adresser ce paradoxe.

 

Quelque chose fait en sorte que Montréal est souvent la ville choisie par les artistes, parmi plusieurs villes canadiennes et internationales. Malgré le fait que plusieurs galeries aient fermé leurs portes, et que certains événements tels que la Biennale et la Triennale aient cessé leurs activités, malgré la hausse des loyers et les ateliers d’artistes étant détruits ou voués à de nouvelles raisons d’être, le désir de faire de l’art à Montréal semble être plus fort que tout. Avons-nous atteint le point où « nous n’avons plus rien à perdre »? Il ne semble pas y avoir de courant en peinture en ce moment – à moins que le nouveau courant soit l’absence de courant? Ou qu’avec le temps, nous serons en mesure de déterminer quelles étaient les tendances actuelles? Avec Pictura, nous espérons pouvoir mettre de l’avant le désir de pousser les limites du médium, même dans des temps turbulents, même face aux changements climatiques, aux difficultés financières, à la pandémie et aux fausses nouvelles. Notre esprit communautaire est basé sur des politiques d’inclusion et d’équité, de droits et libertés individuelles, de solidarité et de sensibilisation. 

 En 1998, la Galerie René Blouin voulait poser un regard sur les courants en peinture au Québec, ce qui a donné naissance à l’événement Peinture peinture. En 2010, Blouin récidive et avec l’aide de l’artiste et commissaire Benjamin Klein, il crée l’événement Peinture extrême, qui vise à souligner l’expressivité et l’utilisation agressive du matériel ainsi que les nouvelles directions en peinture figurative, réagissant à la nouvelle omniprésence de la culture numérique. Dans la décennie qui a suivi Peinture extrême, beaucoup de choses ont changé dans le monde qui nous entoure. Bien que peindre pour le désir de peindre soit toujours de mise, s’exprimer et explorer de nouveaux territoires est certainement plus stressant, pour des raisons aussi floues que le futur incertain que nous tentons d’habiter. Est-il possible que la base du mouvement actuel en peinture soit une absence de mouvement, de style distinctif, et que Montréal soit intéressant à cause de toutes les idées et de tous les artistes qui cohabitent, permettant à une multitude de concepts d’exister et de fleurir? Nos peintres sont à la recherche de moyens pour rendre leur art visible, au-delà du JPG qui ne brille que brièvement sur les réseaux sociaux. Tous tentent de s’exprimer dans le chaos actuel, chaque voix essayant d’être entendue, d’émerger en dehors du vacarme. À travers ces expositions, nous espérons rendre le discours plus limpide.

L’objectif de Pictura est d’exposer et de mettre de l’avant la meilleure peinture que Montréal a à offrir, autant dans les galeries privées que dans des espaces publics et indépendants partout dans la ville. Plusieurs projets de commissariat prendront place et accueilleront des peintres internationaux, ce qui aidera à consolider le réseau des artistes montréalais et à mieux les situer parmi une communauté plus large de praticiens.

____________

What is it about painting in Montreal? There are strong reasons to see Montreal as Canada’s preeminent painting city. It’s been over seventy years since a group of sixteen artists and their teacher dared to confront the establishment and declare their allegiance to a radically progressive form of art and culture in the “Refus Global”. The Automatiste generation formed the vanguard of Canadian Modern Art, amongst them a number of world-class painters. In Barry Schwabsky’s recent book “The Observer Effect: On Contemporary Painting” he notes that “the very fact that the art world imagines an artist must have a career shows it to be profoundly conventional.” The Automatistes, like the Abstract Expressionists, did not expect to have successful careers as such as artists, but profoundly committed to their principles, as all real artists have always done. And while working towards and then within a professional art career as become the norm within our system, with its market, academic, and government-influenced aspects, the main issue remains one of artistic principles. 

 

Where are we now? How do painters in the year 2020 respond to the many difficulties and challenges in the world around us? What is our Refus Global? How can artists, and more specifically painters, confront the troubling realities and serious negativity of our world and system while still being part of these institutions - and still be players in the game? What is becoming more apparent around the globe is that the “institution” of the art world as such is failing the people, in the sense that market trends do not always prove to have staying power, good artists are still often overlooked, discrimination of all kinds is still evident, and the artistic outcomes of it all often fail to inspire us and to reach new audiences. There is a real and negative sense in which the market ironically isolates contemporary art, which generally espouses a populist perspective, all too exclusively for the super-rich, and keeps it from reaching its stated audience, the general public. Many artists’ voices, speaking out from the isolation of the studio into the void, are searching for a statement of purpose that could address these dilemmas. 

There is something about Montreal that keeps bringing artists here, choosing it over other Canadian cities or elsewhere abroad. Even with closing galleries and the end of such mainstays as the Biennale and Triennale, rising rents and studio buildings being torn down or repurposed, the drive to make art in Montreal seems stronger than ever. Have we finally reached that “nothing left to lose” point, where anything goes? There seems not to be a specific trend in painting right now, unless not having a trend is the trend in question somehow, and in time we will put together what our current underlying tendencies were. With this event “Pictura”, we aim to showcase the diverse and powerful desire in Montreal to keep pushing this medium forward in turbulent times, in the face of international issues as daunting as war, climate change, economic uncertainty and pandemics, fake news and deep fakes. We still have a community spirit, based in a politics of inclusion and fairness, individual rights and freedoms, and community togetherness and outreach.

In 1998, the gallerist Rene Blouin was looking at trends in painting that were taking place in Quebec, and organized “Peinture Peinture”, a large event to celebrate them. And together with the artist and curator Benjamin Klein, in 2010 Blouin put together another large-scale multi-venue exhibition under the name of “Peinture extrême/Extreme Painting”, pointing out a specific line of inquiry that revolved around expressiveness, the aggressive use of materials, and new directions into figurative painting, happening as a reaction against the new pervasiveness of digital culture. In the decade since “Peinture extrême”, much has changed in the world around us. Painting for the sake of painting is still going on, expressing ourselves and exploring a near infinite territory has nonetheless become more fraught, and for reasons that have not yet totally clarified, just as there are many ways we do not yet understand the world of the future we have rushed to inhabit. It is possible that the bedrock new movement in painting right now is that there is no trend, no discernible style, and that what makes Montreal such an interesting place to watch, is that it is a large melting pot of ideas and artists, in which many different concepts can take place and thrive. Our painters are thinking of ways in which their work can to be viewed and valued in the flesh, not as a jpg or fleeting moment on a social media platform. Their major keynote is the chaos of our times, every voice trying to be heard at the same time over the din, and we hope that we can add some clarity with these exhibitions.

 

The goal of “Pictura” is to exhibit and highlight the best painting the city has to offer, both in the context of private galleries, and in public and independent spaces throughout Montreal. A number of curatorial projects will take place that will bring in a variety of international painters, which will help to strengthen the network of Montreal’s artists and situate them amongst a global community of practitioners to a new degree.